Les plans de deux amis lunaires se voient bouleversés quand ils découvrent une mouche géante dans le coffre d’une voiture volée. Une nouvelle fois, Quentin Dupieux nous surprend et nous apporte cette année un doux buddy-movie qui nous rappelle les frères Farrelly.
Au début, tout commence tel Pulp Fiction qui aurait rencontré Lloyd et Harry de Dumb And Dumber. Il y est question d’une valise, qui attire une certaine convoitise et qu’un duo de marginaux inséparables est censé récupérer et livrer. Puis, la magie Dupieux opère et « tout se dérègle » comme le dit un personnage du film. Tel une veste en daim qui a bousculé la monotonie de Jean Dujardin en 2019, une mouche géante va être l’élément déclencheur d’un buddy-movie étonnamment doux de la part de Dupieux. Mieux que ça : il est une plaidoyer touchant en faveur de l’insouciance que provoque l’amitié.
Aidé par le talent indescriptible de Grégoire Ludig et David Marsais à rendre crédible les plus extravagants des individus, Dupieux fait de Manu et Jean-Gab de véritables chevaliers qui triomphent face au mépris des autres. En cela, le moteur comique et scénaristique provient de ce choc entre l’insouciance des deux zigotos et de la tranquillité presque inquétante qui isolent ceux qu’ils rencontrent. Le point culminant étant chez ce groupe d’amis (dont une formidable Adèle Exarchopoulos) qui les hébergent suite à un improbable quiproquo. S’adaptant à chaque environnement, que ce soit une caravane ou une résidence luxueuse, les deux compères s’unissent pour affronter de manière hilarante le moindre pépin à leur plan : dompter une mouche géante pour qu’elle braque des banques à leur place.
Les gags font souvent mouche (clin d’oeil) et s’enchaînent aussi vite que les rebondissements. Comme à son habitude, Dupieux se montre particulièrement efficace quand il s’agit de raconter une histoire et la courte durée de ses films parvient à ne laisser aucun temps morts. L’humour n’est jamais en trop et va même définir ce que ce sont les personnages et leur place dans le monde imaginé par l’auteur ; l’exemple le plus fort était le check-Taureau qui unit nos deux anti-héros. Un gimmick varié à n’en plus finir mais qui témoigne bien de la singularité touchante de ses protagonistes. Probablement son film le plus accessible à un plus grand public, Mandibules est aussi une excellente surprise du fait qu’on avait jamais vu l’auteur aussi chaleureux envers ses personnages.
Il sera donc impossible d’entendre une mouche voler dans la salle en raison des nombreux fous rires que le film procure. Son ode jusqu’au boutiste à l’amitié réchauffe l’union de l’expérience collective de la salle de cinéma. Un film parfait pour la réouverture, donc.
Mandibules. Un film de Quentin Dupieux. Avec Grégoire Ludig, David Marsais, Adèle Exarchopoulos et India Hair. Durée : 1h17