Un vétéran de la Guerre de Sécession, chargé de passer de ville en ville pour lire les actualités, voit sa vie bouleversée lorsqu’il doit ramener une jeune fille, enlevée et élevée par la tribu des Kiowa, au reste de sa famille. Toujours dans une quête de ramener le cinéma à notre monde actuel, Paul Greengrass change de focale et signe un Western respectant (trop) ses cahiers des charges.
À la base, La Mission, film produit par Universal, devait sortir au cinéma. Mais nous sommes dans une période impitoyable et puisqu’en plus de la crise sanitaire, nos salles de cinémas sont dans l’incertitude d’une réouverture suite à des non-décisions gouvernementales, le nouveau long-métrage de Paul Greengrass n’est devenu qu’un contenu sans promotion malgré le soutien assidu de la presse spécialisée. Cela tombe bien que l’importance que cette dernière lui voue soit citée car le cœur du film réside en cette lueur d’espoir laissée par l’information, incarnée par un toujours excellent Tom Hanks.
On pourrait croire au départ que le style de Greengrass disparaît au sein de ce classicisme, surtout quand on se rappelle de la nervosité technique de la caméra à l’épaule, presque documentaire, des films comme Bloody Sunday ou Capitaine Phillips. Pourtant, cette frontière entre documentaire et fiction s’implante au cœur même du récit que raconte Greengrass, adapté du roman de Paulette Jiles. Intitulé News of the world dans sa version originale, le film est un véritable plaidoyer en faveur de l’information. Dans une société américaine encore marquée par la violence de la Guerre de Sécession, encore tiraillée entre une politique passéiste et une ouverture au progressisme, la Mission du personnage joué par Tom Hanks (qui rappelle celui de Ben Bradlee, qu’il incarnait dans Pentagon Papers de Steven Spielberg) est de servir d’éclaireur à ce monde meilleur en prêchant des histoires, des faits, à celles et ceux prêt-e-s à les entendre et à progresser. Un postulat de base qui se complexifie à mesure que l’histoire se déroule. Du classique schéma avec des ennemis souhaitant contrôler l’information et laisser imaginer aux citoyen-ne-s une réalité falsifiée (chose qui résonne encore à notre époque…), on passe au genre du Western au moment d’une rencontre importante.
Johanna, fillette de 10 ans capturée par une tribu et censée retourner auprès des membres restants de sa famille, va amplifier cette lumière que Greengrass cherche à diriger sur l’Amérique d’aujourd’hui. Incarnée par Helena Zengel, que l’on avait remarquée l’an dernier dans le drame percutant Benni, ce personnage va alors amener cette charge humaniste au genre du Western. Hélas si l’on perçoit cette humanité derrière le duo d’Hanks et Zengel, qui se reconnaissent en tant qu’êtres solitaires et marqués par la violence subite, le Western apparaît sans réel point de vue. Le film compile les convenances du genre, entre fusillades contre des bad-guys génériques (avec en tête d’affiche, l’un des deux acteurs de The Climb, autre sensation estivale à côté de Benni) et lyrisme du paysage américain trop, ou pas assez, appuyé. Une relecture du genre aussi déserte que les espaces qu’il filme, donc.
On comprend très vite que Paul Greengrass n’a pas pour vocation de se métamorphoser en John Ford, mais plutôt de se rêver comme le Capitaine Jefferson Kyle Kidd, de toucher en plein cœur celui du public en racontant des histoires lumineuses. Il aurait pris l’entrain de Hanks qui lui manque et on aurait trouvé la ressemblance parfaite.
La Mission, réalisé par Paul Greengrass. Avec Tom Hanks, Helena Zengel, Bill Camp. Durée : 1h50. Disponible sur Netflix.